Publié le 30 mars 2022

La consultation publique sur le plan de protection du bruit dans l'environnement de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle pour les prochaines années vient de se terminer

Paris, le 29 mars 2022 - La consultation publique ouverte sur le site du ministère de la transition écologique a donné lieu à de nombreuses contributions. Beaucoup des collectivités territoriales concernées ont transmis des avis délibérés.

L’Autorité de contrôle veille au respect des règles et engagements environnementaux

Le respect des dispositions réglementaires prises par arrêtés ministériels en 2003 pour protéger les riverains des risques d'augmentation des nuisances sonores autour de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle est un objectif majeur de l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA).

Concrètement, l'Autorité de contrôle s'attache à donner suite aux poursuites engagées par les agents assermentés de l'administration de l'aviation civile sur la base des constats d'infraction aux règles édictées par arrêtés ministériels. Elle a ainsi prononcé 709 décisions de sanction au cours des cinq dernières années pour violation des règles de protection contre le bruit à Paris-Charles-de-Gaulle (dont 573 pour des infractions en cœur de nuit). Le plafond des amendes prononcé est de 40 000€ par manquement la nuit, de 20 000€ par manquement de jour.  Le montant moyen des amendes prononcées en 2021 a été très légèrement supérieur à la moitié du plafond.

L'Autorité de contrôle ne se contente pas de sanctionner les manquements avérés, et en général non contestés. Elle conduit une action préventive soutenue auprès des compagnies aériennes pour les inciter à éviter les risques de se mettre en infraction. C'est ainsi que de nombreuses compagnies ont pris des mesures correctives qui ont heureusement permis de réduire de manière significative les infractions.

Parallèlement à l'examen des dossiers individuels, l'Autorité de contrôle est chargée de vérifier et d'analyser le rapport annuel rendant compte, à partir des mesures réalisées par les stations de mesure du bruit, de l'évolution de l'indice global moyen pondéré (IGMP) défini par arrêté ministériel pour apprécier l'évolution de l'enveloppe du bruit dans l'environnement. Ses avis sur l'évolution de cet indice sont publics. Dans son avis sur l'IGMP 2020, l'ACNUSA a relevé une dégradation des caractéristiques acoustiques des aéronefs opérant de nuit et demandé à l'administration de prendre des mesures pour éviter la poursuite de cette dégradation en 2022.

Elle contrôle le respect des règles. Le législateur lui a également confié le contrôle du respect des engagements pris (L6361-7 du code des transports).

Au printemps 2019, l'Autorité de contrôle a constaté que le plafond des mouvements de nuit fixé par arrêté ministériel était largement dépassé depuis plusieurs années. Elle a clairement dénoncé le contournement des arrêtés ministériels. Elle a rendu son rapport de contrôle public après avoir recommandé au ministre que des poursuites soient engagées par les agents assermentés de son administration lorsqu'ils disposent des constats d'atterrissages sans créneau de nuit, comme ils le font pour les départs sans créneau de nuit. Cette recommandation n'a pas encore été suivie d'effet car l'administration craignait de ne pas avoir les ressources humaines nécessaires pour engager ces poursuites, alors même que l'Autorité de contrôle a mis en place un Comité de suivi associant les compagnies aériennes et leurs organisations professionnelles afin de réduire les manquements.

Grace aux efforts de tous, il y a aujourd'hui moins de manquements pour les départs et les arrivées qu'il n'y en avait en 2018 pour les seuls départs.

Il reste cependant des compagnies qui maitrisent mal leurs aléas et qui dépassent les quotas de vols de nuit qui leur sont accordés. Certaines compagnies n'ayant pas d'autorisation pour opérer en cœur de nuit profitent de la situation. Il est regrettable qu'elles ne soient pas poursuivies et qu'elles puissent ainsi échapper à toute sanction pour des arrivées sans créneau en cœur de nuit. Il y a là une distorsion de concurrence entre les compagnies au détriment de la santé des populations riveraines. Des mesures de simplification administrative ont été étudiées pour moderniser le contrôle du respect des quotas des mouvements de nuit accordés par l'administration aux compagnies aériennes autorisées à opérer de nuit à Paris-Charles-de-Gaulle. Ces mesures semblent être dans l'Intérêt de toutes les parties concernées. L'Autorité de contrôle recommande donc de les concerter afin de pouvoir les mettre en œuvre rapidement. Il ne s'agit pas d'introduire subrepticement une nouvelle restriction mais de permettre d'imposer le respect du plafond existant.

L’Autorité de contrôle accompagne la mise au point des plans d’actions visant à réduire les nuisances sonores

La crise sanitaire a provoqué un effondrement du trafic aérien mais il convient de relever que les mouvements sont restés à un niveau proportionnellement beaucoup plus important la nuit que le jour. Cela s'explique par les évolutions différentes des segments du trafic (passagers long-courrier / passagers court et moyen-courrier / fret / aviation d'affaires). Les nuisances sonores nocturnes (22h00-6h00) restent un problème sanitaire important pour une partie significative de la population de l'Île-de-France. La situation en cœur de nuit (0h00-6h00) est particulièrement préoccupante. Elle est parfaitement bien documentée. Alors que le fret connait un niveau d'activités bien supérieur à celui de 2019, la reprise progressive des vols long-courrier au cours de l'année 2022 risque d'aggraver encore cette situation.

Les voies et moyens permettant de réduire le problème de bruit sont connus. Les leviers ont été identifiés par l'Organisation Internationale de l'Aviation Civile depuis plus de 20 ans et l'étude de la mobilisation de ces leviers a été rendue obligatoire en Europe depuis 2014 (règlement UE 598/2014).

Pour traiter le problème de bruit clairement identifié autour de Paris-CDG et de Paris - Le Bourget, il est nécessaire de fixer des objectifs politiques et d'utiliser correctement les outils mis au point au niveau de l'Union Européenne pour les atteindre. La fixation de ces objectifs relève en effet du niveau politique. Il ne peut s'agir que de réduire le nombre de personnes soumise à des niveaux de bruit supérieurs à des seuils à définir avec les autorités sanitaires.

Les deux premiers leviers devant être mobilisés pour réduire les nuisances sonores relèvent pour l'essentiel des opérateurs du transport aérien:

  1. La réduction du bruit des aéronefs relève des compagnies aériennes (renouvellement de leurs flottes pour opérer avec des aéronefs performants au niveau acoustique / planification et programmation des vols / procédures internes de moindre bruit),
  2. La réduction du bruit des opérations au sol relève largement de l'exploitant de l'aéroport et des assistants d'escale (temps d'attente et de roulage / fourniture d'énergie alternative aux moteurs auxiliaires de puissance / véhicules et engins de pistes),
  3. L'optimisation et le respect des procédures de navigation aérienne relèvent largement du service de la navigation aérienne (utilisation des pistes / approches en descentes continues / départs selon les procédures de moindre bruit / respect des volumes de protection environnementale associés aux procédures).

Le troisième levier relève des collectivités territoriales et des représentants locaux de l'État (préfets) puisqu'il s'agit, d'une part d'éviter d'augmenter la population habitant dans les zones les plus exposées au bruit, et d'autre part d'insonoriser les logements, les écoles et les établissements de santé construits dans ces mêmes zones.

L'exploitant de l'aéroport (Groupe Aéroports de Paris) peut également agir en modulant ses tarifs en fonction des performances environnementales certifiées (émissions sonores et émissions de polluants atmosphériques) des aéronefs qu'il accueille.

L'administration de l'aviation civile est en charge de challenger les opérateurs et les collectivités pour établir un plan d'actions (appelé plan de protection du bruit dans l'environnement) consistant pour l'échéance 2024/2028. Il lui revient d'expliciter les résultats qui peuvent en être raisonnablement attendus.

De nouvelles mesures de régulation seront nécessaires si le plan d’actions ne permet pas de satisfaire aux objectifs

Il est hautement probable que le plan d'actions soumis à la consultation publique qui vient de se terminer, ne suffira pas pour satisfaire aux objectifs locaux. Il est donc nécessaire d'envisager un petit "paquet de mesures" de régulation environnementale et d'étudier, selon la méthode dite d'approche équilibrée, l'impact des différents scénarios envisageables afin de permettre au Gouvernement de concerter, consulter et arbitrer les mesures qu'il retiendra.

Parmi les mesures de régulation les plus souvent envisagées sur les grands aéroports européens figurent:

  1. Le plafonnement du nombre des mouvements sur l'aéroport (plafond global / plafond de nuit ou plafond pondéré en fonction des caractéristiques acoustiques des aéronefs autorisés à opérer),
  2. Les restrictions d'exploitation des aéronefs dont le bruit certifié en approche et/ou en survol dépassent certains seuils, en différenciant entre jour/nuit et cœur de nuit.

A Paris-Charles-de-Gaulle, ces mesures existent déjà. Il s’agit de les adapter. Il appartiendra donc au prochain Gouvernement d'apprécier le « paquet » le plus équilibré possible qu'il pourra adopter pour réduire de manière significative le nombre de personnes impactées à des niveaux de bruit supérieurs aux seuils qu'il prendra en compte. Évidemment, plus les actions des opérateurs inscrites au prochain plan de protection du bruit dans l'environnement seront significatives, moins les mesures de régulation auront besoin d'être resserrées.

Quelles que soient les décisions, l'Autorité de contrôle veillera au respect des règles et engagements qui seront pris en début de la prochaine législature pour compléter, ou remplacer, les engagements et dispositions prises il y a vingt ans (arrêtés ministériels de 2003).